"Le rêve du village des Ding" Yan Lianke
Un vieil homme, Ding Shuiyang habite, avec sa famille, son village natal, le village des Ding, situé dans le Henan en Chine. Ses deux fils Ding Liang et Ding Hui vont s’illustrer dans le destin tragique de ce lieu qui a vu naître plusieurs générations successives de personnes issues de cette lignée. Ding Qiang douze ans est le fils de Ding Liang, le petit-fils de Ding Shuiyang. Empoisonné par des villageois dès les premières lignes du roman, comme un fantôme c’est lui qui narre le récit, les aventures du village, les rêves de son grand-père, la décadence de sa famille.
Comment cette famille en est-elle arrivée là ?
Tout commence par le commerce du sang collecté de manière sauvage. Tout va bien pour tout le monde, les paysans s’enrichissent vite en vendant leur précieux liquide rouge. De belles maisons sont construites et équipées avec l’électro-ménager dernier cris. Ding Liang centralise le commerce du sang sur quatre villages dont le sien. À peu près dix ans après les premiers prélèvements, des personnes meurent affectées par ce qu’ils appellent "la fièvre". Cette fièvre n’est que le premier symptôme d’une maladie bien connue : le sida. Ding Liang est alors montré du doigt, son fils meurt empoisonné. Ding Shuiyang demande à son fils d’implorer de leur pardon les familles touchées par la maladie de peur d’autres représailles. Ding Liang n’a que faire des conseils de son père. Nous, lecteur, sommes ainsi témoins de l’escalade irrationnelle de ce personnage auprès des gens de son village. Après s’être enrichi en vendant leur sang, il commence le commerce des cercueils. Il continue par la suite en vendant des "mariages après la mort", puis des emplacements dans des cimetières situés sur des terres de renom.
Nous assistons ainsi à un déballage des coutumes chinoises pré et post-mortuaires à la fois au niveau de l’individu et sur le champ de l’implication relationnelle entre les différentes personnes d’une même communauté. On peut constater un manque de pudeur exprimé dans les lignes de ce récit.
Le niveau d’élévation de l’être reste bien bas. Chaque famille gère les mariages, la mort, même les mariages après la mort de façon comptable et financière...
L’écriture de Yan Lianke montre cette absence de dignité chez ses compatriotes.
Cultiver à la fois des valeurs propres à chacun et sociétales, rester digne malgré une pauvreté matérielle, sont peut-être des réponses possibles pour emprunter rester et évoluer sur la Voie.