"La Grande Vie" Christian Bobin

, par  Emmanuel

Un deuxième article sur cet auteur sachant concilier à merveille les mots, les images, les pensées, les rêveries et tant d’autres choses…permettra d’aller plus loin à la rencontre de Christian Bobin.
Cet alchimiste des mots qualifié par certains de mystique se voit comme un « témoin de merveilles très ordinaires ».

La lecture de « Geai » m’a amené à un premier article, quelques lecteurs et lectrices dont Patricia (adhérente de l’association Souffle et Vie) qui le connaît déjà, me demande si « La Grande Vie » figure dans ma bibliothèque. Merci donc pour ce cadeau.

En savoir plus sur Christian Bobin m’intéresse, j’écoute une vidéo sur la sortie de son livre « La Grande Vie » datant de 2013 que je décide de mettre en lien :
[https://www.dailymotion.com/video/x1u8au6]

Une autre vidéo de "La Grande Librairie" sur France 5 plus récente du mercredi 04 décembre 2019.

Les mots et paroles de Christian Bobin se lisent et s’écoutent,... ils s’interprètent, donnent à réfléchir sur la vie, son sens, ses immenses possibles…

Voici quelques passages choisis, avec l’envie de les partager. Mes différentes approches et visions de ces lectures résonnent avec mes activités de pratiquant de Daoyin Qigong et de jardinier au naturel. Une ode au mouvement et au passage, voici ce que je retiens de « La Grande Vie ».

P. 12 « Votre voix m’arrive avant les mots qu’elle porte. Vous lire c’est regarder le poitrail de l’oiseau qui se gonfle, vous savez, cette joie atomique qui lui monte à la gorge juste avant de chanter. »

« Regarder le poitrail de l’oiseau qui se gonfle » me rappelle la prise d’une intention particulière en Daoyinfa Qigong lorsque l’on réalise l’exercice « de la mobilisation vers l’utilisation de l’énergie ». La quatrième séquence de la forme informe sur la conduite à tenir pour le contrôle du souffle. Il est alors question de serrer les poings pendant la rétention du souffle. On imagine ainsi retenir un petit oiseau dans la main. Ce dernier doit continuer à respirer et également être maintenu. L’utilisation de l’énergie (ou du souffle) est la phase suivante. On pourrait alors entre ces deux phases imaginer ressentir le poitrail de l’oiseau se gonflant. Et ainsi au moment de l’ouverture du poing entendre le chant de l’oiseau.
Cet exercice est décrit dans le Traité d’Énergie Vitale, écrit par Georges Charles et disponible aux Éditions Ellébore. P. 156.

D’autres passages que je ne commenterai pas, mais qui me parlent néanmoins. Libres interprétations pour chacun lors de l’effleurement de ces lignes :

p. 30 « Qu’est-ce « voir » ? Aujourd’hui je dirais : c’est être cueilli, voilà cueilli : quelque chose-un événement, une couleur, une force vous fait venir à lui, comme les petits enfants prennent une marguerite par le cou et tirent. La beauté nous décapite. »

p. 35 « La floraison des cerisiers ne dure pas. L’essentiel on l’attrape en une seconde. Le reste est inutile ».

p. 36 « Une des joies éphémères de l’été, c’est de traverser une rivière en sautant sur des pierres. On écarte les bras comme s’ils étaient des ailes. On appuie les mains sur l’air. On peut glisser, se mouiller un peu, beaucoup. Si on est plusieurs à vivre cette épopée on rit aussi bien de l’échec que de la réussite. »

p. 49 « ... l’histoire d’un enfant si pur qu’il ne pourrait respirer l’air du monde. Alors il retiendrait sa respiration et descendrait en lui-même si profondément que le monde ne pourrait plus l’atteindre. Par intensité de pureté, concentration folle de pureté, il deviendrait plus petit que la plus petite des poussières. »

p. 57 « Les livres ne disparaîtront jamais. Il y aura toujours deux mains pour accueillir un peu de langage, quelqu’un pour s’éloigner de la tribu et recopier les écritures que font les étoiles dans le ciel. »

p. 60 « La légende dit que le sage Lao-Tseu a été vu une dernière fois à une frontière, qu’il a laissé les lumières écrites du Tao au douanier. Il y aurait donc une sagesse qui n’a plus besoin de livre. Elle n’a peut-être même plus besoin du sage. Elle passe dans l’air entre les feuilles du sureau. »

p. 63 « Un camp de concentration invisible couvre la terre dont parfois, par un sursaut d’éveil, un éclair de l’œil, nous sortons l’un des nôtres, nous délivrant du même coup. »

p. 99 « Nous ne sommes séparés de la vie éternelle que par une cloison plus fine que le rideau mouvant des branches du saule pleureur. »


Oiseau tourné en bois réalisé par David un voisin et l’oiseau en céramique de Sylvie.